Dans son livre À la recherche du temps perdu, Marcel Proust s’interroge sur la mémoire, qu’il décrit comme une expérience sensorielle incarnée dans laquelle un petit événement — comme celui de croquer une madeleine — a soudain le pouvoir d’évoquer le passé. Selon Proust, ce qui a disparu persiste non seulement dans les esprits mais aussi dans les sensations et les objets qui nous entourent, suggérant ainsi que nos identités sont étroitement liées aux environnements que nous fréquentons.
Or, devant l’effondrement climatique exacerbé par l’action humaine, les liens sensoriels qui nous reliaient aux milieux et à leurs habitants non-humains s’étiolent petit à petit et parfois à jamais : terres ravagées par les flammes, territoires submergés par les eaux, extinctions d’espèces… Dans ce contexte, comment garder trace et transmettre ce qui est en train de disparaître ou ce qui est déjà perdu ? Comment réparer des liens brisés dans le passé et naviguer vers de nouveaux possibles ?
Face à l’anxiété et au deuil écologique que ces disparitions et modifications supposent, Memo. Souvenirs du futur présente des artistes et des designers dont les œuvres opèrent comme des points d’acupuncture. Leurs interventions sont militantes et critiques. En prenant soin d’espèces disparues, en préservant des gestes et des souvenirs ou en créant de nouvelles formes de mémoire et de rituels, leurs œuvres stimulent nos sens et nous rappellent que résister par le soin est l’option la plus douce mais aussi, peut-être, la plus puissante et la plus féconde dont nous disposons.
